Film (le beau serge)
Le beau serge huile sur toile 65×54 cm
Dans Le beau Serge, de quoi parle-t-on ? du passage d’un monde à un autre.
Le beau Serge voulait être architecte, quitter sa campagne. Il épouse Yvonne. Il a couché 2 fois avec Yvonne. Et l’a mise enceinte. Pas de chance. L’enfant est mort. On dit qu’il était anormal. Serge pense que c’est pour une raison de cosanguinité. Yvonne est de nouveau enceinte. Il boit. Il se saoule tous les jours.
François revient de Suisse ; il a passé son enfance au village… il trouve que le village n’a pas changé mais les gens oui.
Le curé dit qu’ « ils s’enlisent. »
Serge, (Gérard Blain) rejoint François (Jean-Claude Brialy) à son Hôtel. Ce dernier vient de frapper Glomaud, le père de Marie et d’yvonne. Glomaud vient de violer Marie. On dit dans le village qu’il n’est pas le père de Marie. Comme François « voulais qu’il le dise ». qu’il n’était pas le père… il est rentré comme un serpent …
Dialogue ente Serge et François.
F : je t’ai vu arriver par la fenêtre
S : Glomaud vient de me raconter
F : Comment va-t-il ?
S : Tu lui a fait peur.
F : C’est pas grave ?
S : Non penses-tu… Enfin qu’est-ce qui t’a pris ?
F : j’étais hors de moi… c’est tellement dégueulasse…
S : mais non c’est pas dégueulasse… c’est presque normal
F : (il rit ). Contre champs – lumière électrique très contrastée. Au fond t’as peut-être raison… c’est vrai qu’j’vous comprend pas. Les choses paraissent tellement différentes ici.
S : mais enfin François tu as vu comment il vivent. Est-ce que tu te rends compte, il s’est retenu pendant trois ans. Mets-toi à sa place. Vivre avec elle comme ça, sentir qu’elle était pas sa fille.
F : Et Marie, hein, on lui a demandé son avis à Marie.
S : Marie… j’suis sûr qu’elle pensait qu’à ça.
F : c’est pas vrai.
S : j’suis sûr que si
F : c’est pas possible ce serait épouvantable !
S : mais non c’est pas épouvantable ! c’est pas épouvantable, c’est comme ça…
F : mais pourquoi êtes vous comme ça ?
S : tout le monde est comme ça.
F : c’est pas vrai. Vous êtes comme les animaux. On a l’impression que vous avez aucune raison de vivre, aucune
S : non on en a pas (il crie) et où est-ce qu’on irait la chercher ? Tout ceux qui travaille gagne à-peine de quoi vivre ! La terre c’est du granit ! y travaillent oui parce qu’ils ont rien d’autre à faire. Tiens viens voir (il est à la fenêtre, on entend la cloche, les gamins sortent de l’école.) Regarde ça ils ont tous plus de cinq kilomètres à faire pour rentrer chez eux et bientôt ils auront de la neige, jusqu’au genoux p’t’être et ils veulent encore apprendre à lire. Ouais on est des bêtes mais ce qui est sûr c’est que tout le monde s’en fout
F : Va-t-en…
S : A l’armée, comme Jacques. Non. D’ailleurs c’est pas une solution. Tout le monde peut pas foutre le camp. Tu vois ce que je veux dire ?
F : je crois oui
S : faudrait qu’on puise se raccrocher à quekchose… tiens suppose un gars qu’à jamais vu marcher personne ben il aurait pas idée de se servir de ces jambes.
F : Très juste !
S : Tu te fous de moi Hein !
Au bal. Tango. Serge abandonne Yvonne et sort et part avec Marie. Java. François et Serge se battent. François est au sol. Marie à Serge :« ce que t’es fort ! »
François va trouver un moyen de les aider. c’est ce qu’il dit au curé qui lui conseille de quitter le village. « C’est grâce à Serge que j’ai compris. J’crois qu’ils ont besoin d’un exemple.»
– un exemple et c’est toi qui va leur donner !
– Qu’est ce que vous voulez que ça me foute que ce soit de l’orgueil ou pas. Tout ce qui compte pour moi c’est de faire quelque chose pour eux !
La fin du film est pathos plus que pathos. Tragédie à l’ancienne. Yvonne accouche d’un gamin en pleine forme grâce à l’action de François. Grand éclat de rire de Serge. Happy end.
Le beau Serge. Première partie, extérieurs jours. Sardent un petit village de la Creuse. Les gens, leurs mémoires, les non-dis (qui se propagent en messe-basse), pauvreté et manque de foi… 2ème partie : extérieurs nuits. Lumière artificielle. Cinéma. La rédemption (le chemin de croix) ;
Encyclopédie Universalis (en ligne) : Le Beau Serge est le premier long-métrage de la Nouvelle Vague. Le film est auto-produit par Claude Chabrol lui-même, avec l’argent d’un héritage familial. Il est réalisé en plein hiver 1957-1958, à Sardent, village de la Creuse où Chabrol (1930-2010), fils d’un pharmacien parisien du XIVe arrondissement, avait passé les quatre années d’occupation.
Chabrol fait partie du « gang Schérer », le groupe des jeunes critiques des Cahiers du cinéma réunis autour de Maurice Schérer (dont le pseudonyme est Éric Rohmer). Il a entamé des études de droit et s’est passionné pour le cinéma américain populaire et les romans policiers. Il écrit d’ailleurs quelques nouvelles dans Mystère Magazine avant d’être attaché de presse pour la société Fox. En 1957, il signe avec son ami Éric Rohmer le premier livre consacré à Alfred Hitchcock dans la collection Classiques du cinéma, que dirige Jean Mitry.
Parce qu’il est auto-produit en dehors du système, ce premier film aura quelques difficultés à être distribué et devra attendre dix-huit mois après son tournage. Mais la prime à la qualité qu’il obtient du C.N.C. et les ventes à l’étranger remboursent en grande partie ses frais de tournage avant sa distribution. Cela permet à Chabrol de réaliser un second film avec un budget plus confortable et un coproducteur professionnel, Les Cousins. Ces deux premiers films sont distribués en février et mars 1959 dans deux salles des Champs-Élysées. Les Cousins est un triomphe commercial. La Nouvelle Vague est lancée. Le festival de Cannes de cette année-là confirme ce mouvement de rénovation avec la sélection des Quatre Cents Coups et d’Hiroshima mon amour. »
« il fallait, à cause, et cela était plus important, de la télévision, utiliser les lumières importées, réelles dans la rues, dans les extérieurs voire les lumières du jour et surtout de la nuit. Il va y avoir la recherche de pellicules ultra-rapides. La Double-x 1950, la Tri-x en 1954, la 4 –x en 1964. Toutes les pellicules sont dérivées des négatifs couleurs et étaient destinées à la base au 35 mm en noir et blanc. (cette nouvelle pellicule) permettait d’enregistrer des rues la nuit avec un seul éclairage, des néons, etc. ce qui donnait une allure assez fantastique et assez étonnante à l’image mais elle avait comme inconvénient d’avoir une définition beaucoup moindre. Il y avait une sorte de netteté cotonneuse qui faisait très visiblement ressortir le grain et les puristes étaient choqués par cette sorte de saleté et la plupart des chefs opérateurs traditionnels ne voulaient pas l’utiliser. Loin de refuser cette soi-disant laideur, les jeunes gens vont voir tout de suite la beauté intrinsèque de cette pellicule. Celle qui n’est pas flagrante à la base mais qui va apporter quelque chose de neuf dans la représentation. Le premier à faire ça c’est Louis Malle en 1957 avec Ascenseur pour l’échafaud. D’autres cinéastes vont suivre, mais c’est dans les Carabiniers que Jean-Luc Godard pousse la pellicule au maximum de ses contrastes et la pousse rugueusement dans l’esprit d’un Dubuffet, de son art brut… Ça va donner un monde crayeux, d’une immense tristesse comme une fin de civilisation après la guerre, évidemment, un monde un peu terrifiant. Et cette pellicule devient ultra sensible non seulement en tant que telle mais encore plus au théâtre de l’absurde, de la cruauté et de notre société contemporaine. Il y a manifestement une adéquation entre la représentation du monde et la façon dont la pellicule rend compte de cette représentation du monde. »
« La Nouvelle Vague, c’est 1958-1959… » Une histoire de la Nouvelle Vague 16/20 par Jean Douchet – France Culture 2013.
On a opposé les deux cinéma, la « Qualité Française » (décriée par Truffaut) et la Nouvelle Vague. C’est surtout par la forme que les films différent. La qualité française c’est la lumière léchée des studios, la nouvelle vague, le noir crade, les décors naturels . On a opposé Les tricheurs de Carné et Les cousins de Chabrol, deux films sur la jeunesse qui s’émancipe. (mais Les Cousins de Chabrol sont tournés en grande partie en studios et la photo est léchée).
Godard dans les cahiers du Cinéma n°89 de novembre 1958 décrit Les Cousins. « Les Cousins ajouteront un chapitre inédit à la Comédie Humaine. On y verra en effet Rubempré habiter chez Rastignac. Mais Les Cousins seront aussi du La Fontaine modernisé. On y verra en effet un rat des villes nommé Jean-Claude Brialy tyranniser un rat des champs nommé Gérard Blain, sans oublier une cigale nommée Juliette Mayniel. En fin de compte Les Cousins seront le plus chabrolesque des films, puisque ce sera l’envers du Beau Serge. En tous cas Les Cousins ne seront pas un film de Carné. Vous ne verrez jamais Popaul, ni Flo, ni Carolus tricher avec eux-mêmes. Ce sont de grandes âmes. Ils aiment le poker. Mais ils savent que le seul moyen de bluffer est encore de dire toute la vérité. D’ailleurs Carolus en mourra, car Popaul a lu dans Cocteau jusqu’où il avait le droit d’aller trop loin. Bref Les Cousins seront un film attachant qui vous détachera des biens de ce monde, un film faux qui vous dira ses quatre vérités, un film d’un creux infini, donc profond ».
On opposera aussi le scénario très écrit du cinéma de papa et la liberté d’improvisation de la Nouvelle Vague. Mais les Cousins est un film très écrit !
On dira que La Nouvelle Vague filmait la vie et Carné déclare à Françoise Giroud dans l’Express du 16 octobre 1958 : « Il suffit de passer trois heures au café Bonaparte pour rencontrer des tas d’individus comme ceux que j’ai montrés dans le film, à quelques variantes près. Ces garçons et ces filles ne font absolument rien, vivent chez papa et maman. Ils font un peu de figuration quelquefois ou se livrent à quelques petits trafics. C’est tout. On discute, on écoute de la musique, c ‘est ce que j’ai tenté de faire ressortir. /…/ Peut-être mon film ne reflète-t-il pas la pensée de tous mais je ne crois pas avoir trahi celle de ceux que j’ai pu contacter. »
La différence c’est probablement que les personnages de Chabrol ne semblent pas avoir rien d’autre à nous montrer qu’eux-mêmes. Chez Carné je les trouve, un peu stéréotypés, porter leur message. Et la mise en scène plus libre chez Chabrol. Bien moins figée que celle de Carné. Carné semble filmer un monde qu’il ne connaît pas (différence évidente de génération), de l’extérieur, Chabrol est à l’intérieur.
« Et pourtant il y a autant de différences entre eux qu’entre une peinture pompier de la fin du XIXe et un tableau impressionniste ! Où faut-il donc chercher cette différence de nature pointée par Godard, si ce n’est dans l’investissement matériel et artistique que nécessite l’élaboration d’un film ? Bazin évoquait une vision du monde et du cinéma, Truffaut parlait de vibration, Labarthe de regard, toutes notions qui relèvent de la philosophie du sensible. » (Jean Lou Alexandre – Les Cousins des Tricheurs De la « qualité française » à la Nouvelle Vague – Harmattan).
Charles (Gérard Blain) monte à Paris pour suivre ses études de droit. Il loge chez son cousin Paul (Jean-Clade Brialy). Charles est un provincial introverti, fils à sa maman qui a accepté qu’il monte à la Capitale, parce qu’il vivra chez Paul. Paul est un jeune homme extraverti, un gosse aisé de la Ville. Il fait la foire, organise des soirées très arrosées et les filles passent de l’un à l’autre. Florence est une « putain », Charles s’éprend d’elle « Je vous aime. « « Maman me disait……… » etc.
Il y a cet autre type Clovis, il a au moins trente ans
– Clovis ? Un ami. Il fait des affaires. Il est amusant.
Ce soir là Clovis a convié à la fête chez Paul, un italien qui complétement ivre tire sur les jeunes gens avec un revolver… vide.
C’est hilarant. Florence rappelle Charles et le lendemain, il se donne rendez-vous. Mais un quiproquo les empêche de se retrouver à la fac. Et Florence a deux heures à tuer. Chez Paul. Où celui-ci et Clovis dans deux monologues interminables lui prouvent par A+B qu’elle et Charles, c’est impossible. Elle finit dans le lit de Paul. Florence, Paul et Charles vont vivre sous le même toit. Charles va se plonger dans ses études sous les conseils du libraire du quartier « les jeunes gens ne lisent plus que des pornos et des Thrillers. » Celui-ci lui a conseillé Balzac. Paul continue sa vie de bombance, sans se préoccuper de travailler et il sera reçu à ses examens. Il renvoie Florence. Celle-ci revient vers Charles qui l’éconduit. « J’ai promis à ma mère d’être reçu et j’y tiens à ma mère. Vous ne pouvez pas comprendre qu’on aime sa mère. Vous ne pensez qu’à coucher. Fout le camp. Tu me rends malade. Je n’ai pas de temps à perdre dans vos beuveries. » Charles sera collé à ses examens.
Scène de nuit, Charles erre dans Paris. Il croise Florence. Il jette ses cours, c’est trop tard et sa carte d’étudiant à la Seine. En rentrant chez Paul alors que celui-ci est endormi, il charge une balle dans le revolver, fait tourner le barillet, se dirige vers Paul. « Il a une chance sur cinq ». Clic, ce n’est pas la bonne. Charles s’endort. Au matin Il apprend à Paul qu’’il est collé. Celui-ci tente de lui remonter le moral, il se remémore l’italien qui jouait avec le pistolet ? Il tire. La balle tue Charles.
C’est Juliette Mayniel qui joue Florence.
La génération précédente ? Le mariage ? on s’en moque.
« – Les cornes de l’oncle Henry, quelque part en avion entre New York et Miami, avec 2 poules, Le tonton Henry, tu sais qu’y s’ennuie pas. Il a comme ça un petit appartement dans chaque ville.
– Tu sais que maman m’a dit que ses trafics étaient un peu louche
– Ta mère ? Tu veux que je te dise ce que je penses ? Ton papa pis mon papa y font figures de cons.
Charles écrit chaque jour à sa mère : « Ma chère maman… »
Paul, à sa poule Geneviève, qu’il a mise enceinte cet Hiver : « tes parents le savent ?
– Je leur ai dit
– C’est malin (Clovis)
– Oh Paul, je ne leur ait pas dit que c’était toi… mais Papa voulait absolument savoir alors…
— Je croyais que tu étais une femme libre (Clovis)
—Oh je t’en pris ne te fous pas d’elle (Paul)
– Alors qu’est-ce qu’il a dit PAPA (Clovis)
– Il a fait ses valises, il est partit avec maman sur la côte en m’disant débrouille toi.
— Ah magnifique ! T’inquiète pas je vais t’arranger ça. Ce ne sera qu’un mauvais moment à passer (Clovis)
— non, je n’veux pas.
— Qu’est-ce que tu veux faire d’autre ? (Clovis)
— C’est ce qu’il y a de mieux, tu sais. (Paul)
Paul donne 3 billets à Clovis.